COMMENT
DEVENIR TRES VITE EXPERT EN DEGUSTATION DE VINS
Pour
illustrer la nouvelle publication de mon ouvrage : « LA
BIBLE DU GOUT ET DES MOTS DU VIN », je publierai, régulièrement
dans un premier temps, durant plusieurs semaines, sur mon blog Goût
et Images, (goutsetimages.blogspot.com) mes réflexions acquises par
l'expérience, sur l'usage de la dégustation, ses effets sur les
dégustateurs, ses mystères, son influence sur nos comportements,
sur notre savoir ainsi que sur notre soif de culture. En résumé,
tout l'intérêt du principe de déguster sur notre personnalité. Le
tout confinant dans l'océan de l'acquisition de ce qu'on nomme d'un
mot devenu commun mais riche de mystère « le plaisir ».
La dégustation bien ordonnée et riche d'enseignements conduit à
la découverte d'émotions échelonnées sur des intensités
diverses, avant de parvenir à une finalité biologique, celle du
plaisir.
La
maîtrise de la dégustation nous rend plus intelligible, plus
interdépendant de la nature et de nos aliments. Notre esprit se
gorge de toutes les sensations qu'ils nous offrent à longueur
d'année. Le fait que la dégustation repose sur une assise
multidisciplinaire, c'est l'univers de la connaissance et celui des
sens qui s'interpénètrent pour notre plus grand plaisir.
---------oo O oo---------
LA
DEGUSTATION DES VINS ET DES ALIMENTS RENFORCE NOTRE SENS DE
L'HUMANITE -3 -
Blog
du 22 octobre 2012
LA
MEMOIRE SENSORIELLE : du plaisir plein la tête
Concentrons-nous,
aujourd'hui, sur notre mémoire sensorielle. Grâce à la
dégustation, nous la découvrons par une prise de conscience tout à
fait louable en nous introduisant dans l'antre du désir. Nous
constatons que, de cette mémoire, nous nous en servons
inconsciemment mais pas assez sélectivement dans la vie courante.
Et pour cause. En réalité elle s'exprime d'elle même, en shuntant
notre volonté. Cela prouve que nous manquons de concentration
suffisante pour diriger nos propres pensées. Combien de fois, que
ce soit en ville, à la campagne, à la mer comme à la montagne, en
été comme en hiver... traversez-vous un lieu et soudain, vous
captez une odeur plus ou moins fugace. Elle nous interroge qu'elle
provienne de la proximité immédiate ou de loin portée par des
courants d'air... Vous êtes incapable, huit fois sur dix, d'y mettre
un nom, une identité. Nous pourrions prendre d'autres exemples
touchant aussi bien la mémoire iconique (visuelle) ou échoïque
(son). C'est ce qui se produit en dégustation.
Si
une odeur vous interpelle, émotionnellement, sans ne rien rappeler
dans vos souvenirs, ne cherchez pas et ne vous mettez pas dans un
piteux état. Cette odeur n'est pas dans votre bibliothèque
sensorielle. Point barre ! C'est la révélation même que vous
ne l'avez jamais enregistrée dans votre vécu. C'est ce qui nous
aide à confirmer notre postulat que l'on ne cesse de répéter
presque à longueur d'année, à chaque leçon ou article lorsqu'on
aborde la dégustation. Cela devient une antienne, peut-être, mais
cela résume tellement la première vérité ou premier précepte de
la dégustation : « En dégustation, on ne peut
reconnaître que ce qu'on connaît, qu'on a enregistré dans sa
mémoire ».
Oui,
mais... A ce propos, il faut tout de même moduler et expliquer qu'il
peut y avoir une erreur d'aiguillage au niveau des neurones. Au cours
d'une dégustation, on peut être amené à reconnaître une odeur
qui ne vous est pas étrangère bien que vous soyez incapable de la
désigner sans l'ombre d'un doute. « Cette odeur me rappelle
une fleur (par exemple, oui mais laquelle ? ». Phénomène
bizarre et courant dans toutes les dégustations. Eh bien votre
cerveau qui a réagi à la molécule de cette odeur (ou aux
molécules, plutôt) a dérivé, dans votre mémoire sensorielle,
vers d'autres lieux de reconnaissance d'une ou plusieurs molécules
« cousines » reconnues par d'autres neurones, molécules
presque semblables et votre mémoire sensorielle va, ainsi, vous
induire en erreur. Erreur relative, certes, mais qui vous assure, in
petto, que telle odeur ressentie a bel et bien pour origine tel
responsable (tel nom de fleur, de fruit... que vous pensez
sincèrement correspondre à l'odeur perçue). Donc, danger !
Même si cela ne changera en rien votre analyse globale. Vous devez
donc être attentif à ces dérives olfactives.
Cette
maxime « de ne reconnaître que ce qu'on connaît »,
est porteuse d'une profonde vérité et elle vient,aussi tonitruante
qu'un tonnerre en rase campagne ou aussi aveuglante qu'un éclair la
nuit, détrôner les velléités de tout débutant désireux de
mettre la charrue avant les bœufs. S'appuyer sur sa mémoire
sensorielle n'est pas un vain propos mais un acte qui mérite d'être
très réfléchi. Débutant en dégustation, nous souhaitons à tout
pris vouloir donner un identifiant à une odeur. Comme ses aînés
qui sont rompus aux nombreuses expériences. Précisons que tout
débutant ne sera jamais ridicule en ne percevant difficilement les
odeurs d'un vin. L'apprentissage commence déjà dans l'humilité.
Malgré
tous les efforts que l'on puisse fournir, cette mémoire sensorielle
possède un pouvoir incommensurable. Elle réclame, de ce fait,
respect et attention. Elle sera d'autant plus efficace que nous
saurons l'entretenir, lui donner la vivacité dont elle a besoin pour
s'exprimer, la nourrir et la perfectionner comme on le fait à
longueur d'année pour toutes les parties de son corps. La mémoire
sensorielle a, elle-aussi, besoin de propreté, d'hygiène (mentale
et psychologique), d'éviter certaines contraintes et d'être
rassurée. Lui faire confiance, c'est fidéliser l'un des instruments
essentiels et les plus performants de notre cerveau.
La
mémoire sensorielle est mise à contribution régulièrement, tout
le long de notre vie, quotidiennement. Grâce à elle, l'être humain
possède une faculté rare, celle de détenir des pouvoirs qu'il ne
soupçonne pas. Ou si peu ! Nous avons en nous, de véritables
trésors qui sommeillent et que nous n'utilisons jamais (ou rarement)
pour nous aider à réussir dans la vie, nous donner plus de chances
de succès, plus de possibilités. Est-ce vraiment notre faute si
nous ne savons pas mettre en pratique des forces dont on ne nous
jamais livré le mode d'emploi, à un moment ou autre de notre vie ?
Le
souvenir des sens dépend, bien sûr, de cette mémoire mais aussi du
pouvoir d'attention et de concentration que nous engagerons. Cette
phase essentielle ne peut souffrir de distraction ou de
superficialité que ce soit lorsque l'on admire un paysage, une
peinture, des gestes de professionnels, lorsqu'on écoute une
musique, lorsqu'on sent une odeur, un parfum, lorsqu'on goûte un
mets... nous ne devons jamais nous laisser distraire par l'habitude,
le mauvais réflexe d'inattention, pendant ce stade de focalisation
des sens où toute évocation, toute analyse, toute justification de
précision et de sens nous permet de capter le moindre sentiment de
découverte et d'émotion qui, invariablement, vont nous apporter du
plaisir. Nous savons que la connaissance est pétrie de multiples
plaisirs. Le circuit de la récompense de notre cerveau est un
mouvement issu d'interférences neuroniques, un cercle inamovible et
constant qui doit achever sa course sans ne connaître aucune rupture
lorsqu'on tient à cette finalité qu'est le plaisir. Finalité ou
moyen ? Cela ramène à une autre réflexion.
Si
l'on envisage de s'atteler à l'apprentissage de l'éducation au goût
comme un étalon de race à son chariot, il faut s'attendre, comme
dans tout domaine de transport, à des turbulences notoires, surtout
lors de ses premiers cours. L'éducation au goût est aussi vaste que
la surface de tous les océans réunis, avec, en prime, des remous
importants. Elle englobe tous les sens et elle oblige à affûter sa
mémoire sensorielle d'une manière sélective et segmentée. Cette
éducation concerne aussi bien l'art pictural, l'art musical, l'art
olfactif (monde des parfums) que l'art gustatif.
La
dégustation des vins n'est pas un monde élitiste mais à plusieurs
vitesses. Il s'octroie trois pôles pouvant s'interpénétrer, se
côtoyer mais jamais s'ignorer. Le premier est celui de la
production. L'univers du vigneron et de ceux qui travaillent la vigne
et ceux qui élaborent les vins. Ensuite, l'univers de la
distribution et du commerce. Un univers quelquefois, de nature
psychorigide avec ses lois et ses principes, manquant parfois
d'humilité et de loyauté. Avec le temps et l'exigence des clients,
dans un milieu très concurrentiel, c'est un secteur qui a appris la
rigueur et la nécessité de s'imposer des codes de la qualité pour
respecter l'acheteur. Enfin, l'univers de la consommation et des
collectionneurs d'étiquettes, vaste et informel. A chaque stade,
chaque individu concerné a été confronté à ce que l'on nomme,
l'apprentissage de la dégustation, face aux nécessités des marchés
et de l' évolution des exigences humaines.
La
dégustation est donc devenue un outil transversal commun qui relie
chacun de ces trois univers et assure à tous les dégustateurs
d'entrer en intimité avec les vins qu'ils produisent ou qu'ils
commercialisent ou, enfin, qu'ils achètent pour leur plaisir.
Si
chaque acteur, dans les trois filières, ont des histoires à
raconter c'est que le principe de la dégustation leur a permis
d'assumer une introspection personnelle. Tout dégustateur et tout
vin qui se rencontrent se disent des choses que chacun porte en lui.
Le vin, en portant sa propre histoire se confrontera à un moment ou
à un autre avec notre mémoire sensorielle. Que ce soit sur un lieu
de production, dans un salon, ici ou à l'autre bout du monde, cette
mémoire devra interagir face à ce vin. Le producteur sera enclin à
nourrir le débat d'un trop plein d'affectivité pour son enfant.
Face au même vin, le commercial racontera sa propre histoire imbibée
d'un fort dosage d'arguments dont la rhétorique est propre à
défendre, avec sincérité, ses intérêts. Quant au consommateur,
face à ce vin, il devra se créer ses propres images à partir de
toutes les informations. Il aime, la plupart du temps, entendre ce
qu'il souhaite intérieurement. De mettre à sa disposition
intellectuelle et affective suffisamment de symboles qui aideront sa
propre imagination à fantasmer.
La
mémoire sensorielle, ne l'oublions pas, est une vaste autoroute qui
traverse deux contrées du cerveau, l'affectivité et l'émotion. Si
on les laisse gouverner, ce sont elles qui guideront, le monde de la
dégustation. L'expérience prouve que, si elles assument notre
plaisir individuel, ce qui n'est pas rien, elles détournent une part
de la vérité.
Pourtant,
nous ne pouvons la nier ni l »esquiver. La mémoire sensorielle
est un dénominateur commun à tous les êtres et, en matière de
dégustation nous sommes obligés d'en appeler à elle
continuellement. Elle nous rassemble et nous humanise à chaque
séance, le verre de vin face à soi, dans la pénombre de nos
appréhensions, de nos émerveillements et de nos instants de
bonheur. Elle revisite toute la panoplie de sensations que chaque
perception façonne, le long de notre vie de dégustateur. Celle-ci
s'enrichit et se bonifie avec le temps, les épreuves œnologiques,
les harmonies avec les mets que ce soit dans ses plus somptueuses
merveilles d'union de bouche comme les plus regrettables couacs
disharmoniques... L'expérience fortifie notre mémoire sensorielle,
y compris nos erreurs qui nous aident à grandir. Elle prospère et
nous rend chaque fois plus heureux. Elle entre dans les rouages du
bonheur et argumente notre langage de pensées qui cimentent un peu
plus la chaîne humaine des dégustateurs.
Vive
la dégustation sans frontières.
Christian
SAINT ROCHE
Prochain
blog : LA DEGUSTATION DES VINS ET DES ALIMENTS RENFORCE NOTRE
SENS DE L'HUMANITE – 4 -
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire